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La gourmandise est un vilain défaut. [Tradd <3]

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La gourmandise est un vilain défaut. [Tradd <3] Empty La gourmandise est un vilain défaut. [Tradd <3]

Message par Shaelyn Stern Dim 11 Avr - 20:08

Sur les sept péchés capitaux que tout le monde connaît, je devais bien en avoir cinq, et la gourmandise venait certainement juste après la luxure. Cela n'avait rien d'étonnant, les deux étant à mon sens étroitement liés. Ils évoquaient chacun le désir, la tentation... Ravir ses papilles avec une douceur, c'était comme goûter la peau d'un homme - ou celle d'une femme. Qu'y avait-il de plus sensuel que les friandises ? L'aphrodisiaque chocolat, les sucettes, la crème fouettée, tout était d'un érotisme pur. Qui a dit que les bonbons devaient uniquement être réservés aux enfants ? D'ailleurs, j'en avais moi-même été privée étant petite, et m'étais rattrapée en arrivant à Poudlard. Il en avait été de même avec les garçons. Même durant ma première année au château, je n'attirais pas les convoitises. Qui pouvait s'intéresser à une asperge maigrichonne à la peau blafarde et aux cheveux ternes ? Heureusement que Kayla avait été placée sur mon chemin pour me permettre de découvrir ma véritable nature. Puis il y avait eu Skyler, et j'avais alors compris que, tout comme avec les sucreries, je ne pourrais plus jamais me passer de ce à quoi j'avais réellement goûté.

Cette nuit-là, comme les précédentes, je n'arrivais pas à dormir. Depuis l'irruption, quelques jours auparavant, de cette Catsy Ridley, je restais des heures chaque soir à tenter de fermer l'œil avant que le sommeil n'eût enfin raison de moi. J'avais beau me dire qu'elle était la fille d'Anissa, que comme sa mère elle devait extrapoler les faits voire affabuler, il y avait nécessairement des détails réels. Il allait sans dire que la relation entre Sky et Kerr n'était que pure invention, conséquence sans doute d'un coming out de ce dernier. Un mariage entre Sky et Leslie était également grotesque, bien qu'ils eussent commis un écart ensemble. Ergo, ça signifiait que dans chacun des cas, cette fille s'était inspirée de quelque chose d'avéré. Alors d'où tenait-elle ces histoires de mariage avec Cooper ? D'accord, j'avais craqué, je m'étais laissé aller avec lui, mais nous n'avions absolument rien en commun. Il y avait de quoi s'arracher les cheveux.

Je remarquais d'ailleurs que tout ce qui était prédit pour moi allait totalement à l'encontre de ce que je désirais. Je ne voulais pas devenir mannequin, ce milieu-là étant trop superficiel pour moi. Je ne voulais pas me marier, sachant bien qu'il m'était impossible d'entretenir une relation stable avec mon don. Je ne voulais pas d'enfant de peur de leur transmettre ce que je considérais souvent comme un handicap dans ma vie. Et je ne pouvais pas sombrer dans la drogue étant donné que je la fuyais comme la peste, connaissant ses effets sur mon organisme. A croire que cette Catsy avait lu ma biographie et décidé de m'attribuer tout ce qu'abhorrais, jusqu'à mon propre mari, ce parfait petit Poufsouffle gentil et loyal. J'espérais au fond de moi qu'Anissa ne ferait jamais d'enfant. Mieux valait éviter que sa bêtise ne se multiplie. D'autant que sa fille était loin d'être jolie. Anissa l'était, pourtant... Avec qui avait-elle donc bien pu faire cette gosse ? Après tout, j'étais peut-être à côté de la plaque. Tout était faux, la gamine s'était échappée de Sainte Mangouste, et les coïncidences n'étaient que des coïncidences.

Me relevant soudain en position assise, comprenant qu'il me serait impossible de m'endormir dans ces circonstances, je regardai l'heure. Une heure du matin ? Comment le temps pouvait-il passer si vite quand on restait ainsi éveillé ? La fille Ridley avait peut-être fait un bond de 25 ans dans le passé, je me demandais si parfois nous n'en faisions pas de quelques heures dans le futur. Mon estomac gargouilla subitement. Évidemment, je n'avais pas mangé depuis plusieurs heures. "Qui dort dîne", et je n'avais pas dormi. Je me levai, bien décidée à en découdre. Puisque le sommeil ne venait pas, j'allais compenser avec un peu de nourriture ; Le ventre plein, Morphée m'accueillerait sans doute plus facilement à bras ouverts. Autour de moi, les autres filles n'avaient vraisemblablement pas les mêmes soucis. Toutes étaient parfaitement inertes, et je n'entendais que le bruit de leur respiration. Quelle chance pour elles...

Pieds-nus, je sortis de la chambre sans prendre la peine de me changer. Qui croiserais-je à cette heure ? Le chemin entre ma salle commune et les cuisines n'étaient pas bien long. Certes, je savais que souvent d'autres élèves avaient la même idée que moi - les cuisines étaient un véritable repaire à gourmands la nuit -, encore fallait-il qu'ils aient l'idée d'arriver au même moment. Je gardai donc la chemise que je portais pour dormir : une chemise d'homme dont la longueur m'arrivait à mi-cuisses. J'avais beau être grande, le propriétaire de ce vêtement me dépassait d'une bonne tête ; J'avais piqué cette chemise à Nick un jour où j'avais dormi avec lui. Au départ, c'était pour avoir son odeur sur moi. Dès le premier lavage, l'odeur avait bien entendu disparue, mais j'avais eu envie de garder l'habit pour m'en faire une tenue de nuit. Dessous, je portais un simple shorty en coton, plus confortable pour dormir. Mes cheveux, lâchés sur mes épaules, étaient certainement ébouriffés.

Comme je l'avais prédit, je ne croisai personne sur mon trajet. Arrivée aux cuisines, je humai l'odeur qui s'en dégageait. Tous ces parfums me mettaient l'eau à la bouche et je ne tardai pas à chercher de quoi me sustenter. Je jetai mon dévolu sur des portions de gâteau à la crème, disposées sur un plateau, qui semblaient fort alléchantes. Étaient-elles prévues pour le déjeuner du lendemain ? Qu'importe, les elfes de maison en feraient d'autres. Je m'emparai d'une part et la portai à la bouche avec appétit. Je laissai délicieusement la crème fondre sur ma langue avant de l'avaler. Je ne me goinfrais pas, je savourais, allant même jusqu'à fermer les yeux pour éveiller plus encore mon sens du goût. Hélas, mon plaisir fut de courte durée. J'entendis des pas derrière moi qui me tirèrent de ma bulle. Ouvrant brusquement les yeux, je me retournai pour en connaître l'origine et apercevoir le perturbateur. Je restai bouche-bée en découvrant son identité. Devait-on parler de "destin" dans un tel moment ? Celui qui, d'après la soi-disant Catsy Ridley, devait m'être promis dans le futur, venait de faire son apparition sous mon regard stupéfait. Il devait y avoir une chance sur des milliers pour que cela se produisît. Était-ce une coïncidence ou bien avais-je senti, peut-être grâce à mon don, que je devais venir ici ? Non, c'était mon ventre qui me l'avait fait sentir, tout bonnement. C'était simplement un hasard si j'étais tombée justement sur lui.

Étant données les circonstances, je n'aurais pas dû être spécialement heureuse de me retrouver seule avec lui. Nous ne nous étions pas revus depuis cette histoire de futur, et n'avions pas pu en discuter. Comment aurions-nous pu de toute façon, puisque nous nous détestions ? Il représentait pour moi le comble de la banalité, et se donnait des airs de jeune premier que j'avais du mal à supporter. Alors, pourquoi mon cœur contredisait-il ma raison ? J'avais beau me persuader de partir au plus vite, je ne bougeais pas. Et non seulement je ne bougeais pas, mais j'étais bien aise de sa présence. Cependant, je ne tenais pas à ce qu'il s'en aperçoive, et lui adressai donc un regard las pour lui montrer qu'il me dérangeait et que, par surcroît, il était la dernière personne que j'avais envie de voir.

    - C'est bien ma veine... Il fallait que je tombe sur toi ici, à une heure du matin... J'aurais bien aimé finir de manger avant que tu n'arrives.

Je posai mon gâteau et léchai mes doigts pour les nettoyer. Puis, je fis mine de partir, bien qu'au fond je n'en eusse pas du tout envie. Seulement voilà, je savais qu'il fallait que je mette un terme à tout ça si je ne voulais pas qu'un jour, effectivement, il me passe la bague la bague au doigt. Car j'avais beau me convaincre que mes écarts avec lui étaient sans conséquence, je sentais bien que je commençais à ne plus pouvoir m'en passer. Cette annonce, bien que rocambolesque, allait certainement creuser un fossé entre nous, ce qui n'était pas plus mal. Je n'avais plus qu'à prendre sur moi et à quitter cette pièce, et tout irait bien. Pourtant, contre mon gré, je me retournai.

    - Finalement, fais ce que tu veux, je ne vais pas me priver pour toi.

Je récupérai mon gâteau et mordis à nouveau dedans avec délectation. Je me hissai ensuite pour m'asseoir sur le buffet, dépassant ainsi le Poufsouffle de quelques centimètres, et croisai mes jambes nues devant lui, geste qui trahissait mon attirance inavouée.

    - Écoute... Tu ne crois pas à ces histoires de mariage, n'est-ce pas ? Toi et moi, on n'est pas compatibles, et c'est pas demain la veille que j'épouserai quelqu'un.

Nonchalamment, je fis glisser mon doigt sur la part de gâteau pour en récupérer la crème et le porta à mes lèvres pour le sucer. Je mentais, en un sens. Il y avait bien un domaine où nous étions parfaitement compatibles, mais je me gardais bien d'en faire allusion. Cependant, il était fort probable qu'il l'eût lui-même constaté, car je n'avais pas l'habitude d'être discrète quand je prenais du plaisir.
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Message par Tradd Cooper Mer 14 Avr - 22:12

Rien ne me paraissait plus insupportable que l’incertitude, le sentiment lancinant, obnubilant, de perdre le contrôle de la situation, de toute ma vie. Or, depuis plusieurs semaines, mes quotidiens n’étaient composés que de doutes, d’hésitations perpétuelles. Dans les premiers temps, je m’en étais, pour ainsi dire, accommodé. Je n’étais alors guère convaincu que les rumeurs à propos de ma propre mort fussent exactes. A vrai dire, elles me semblaient à peine croyables, et il m’avait fallu vivre les évènements du soir du bal pour que je comprenne qu’il n’était nulle rumeur. Les visions de Montana D. Jones prédisaient l’attaque des cagoulés, comme elle me l’avait confié en espérant changer mon triste destin, et tout s’était déroulé exactement comme elle me l’avait affirmé. Evidemment, j’avais immédiatement compris que ma propre sentence n’allait pas tarder à tomber, sans pour autant en avertir qui que ce soit. Certes, je risquais de perdre la vie – on risquait de me l’arracher, pour être plus précis – mais je m’appliquais, je m’entêtais si l’on en croyait les paroles de Montana, à ne rien changer. Ainsi, le soir du bal, j’avais agi avec un peu trop de témérité, m’évertuant à accomplir tout ce que j’aurais accompli si je n’avais pas eu conscience de l’épée de Damoclès au-dessus de ma tête. J’en étais sorti sain et sauf, m’étais débattu plusieurs jours contre les pensées obscures qui s’accumulaient dans mon esprit. A chaque instant, l’éventualité de ma mort ‘soudaine’ me poursuivait. Je vivais avec ma mort, rêvais de ma mort, je ne pensais qu’à ma mort, et plus je cherchais à lui échapper, plus elle semblait me rattraper. J’en éprouvais de violents vertiges.

Je me redressai soudainement, arrachant une houppette d’herbe fraîche au passage, lançai un regard circulaire autour de moi. La nuit était finalement tombée, lâchant sa chape plomb sur le parc et ses environs, les ombres jouant de leurs reflets, ça et là sur la roche humide du château. L’astre doré et ses flèches ambrées avaient doucement laissé place à l’argent de la lune, et je ne m’en étais même pas aperçu, trop absorbé par mes affligeantes pensées. Las, je laissai échapper un soupir aux teintes légèrement désespérées. Je n’y comprenais plus rien. Il y avait seulement quelques jours, on prévoyait ma mort comme si elle était écrite dans le marbre, comme si je ne pouvais lutter contre ma fatalité. Et voilà que, tout soudainement, une certain Catsy Ridley apparaissait d’on ne savait où, prétendant débarquer du futur – vingt-ans ans dans le futur, rien que ça ! – et m’apprenait que j’allais épouser Shaelyn Stern – rien que la pensée que cela puisse arriver me faisait grimacer. Certes, nous avions certains points communs. Plutôt un à vrai dire, mais il n’était que purement physique ; une attirance à laquelle nous avions mutuellement consenti à nous abandonner, et je n’imaginais guère ma vie à ses côtés. Pour être tout à fait franc, depuis plusieurs semaines, j’avais appris à ne plus imaginer ma vie du tout. N’étais-je pas censé succomber à un sortilège lancé par les sbires d’Andrews ? C’était à n’y rien comprendre.

Mû par une force invisible, une main qui m’entrainait en direction des lourdes portes en bois, je m’efforçai d’oublier ce que cette Catsy avait ensuite confié. Non content de passer la bague aux doigts de la sulfureuse Serpentard, j’allais – supposément – lui faire un enfant. Un enfant qui semblait avoir ravi mon destin funeste, puisqu’il serait – supposément, une fois encore – assassiné par Clyde Andrews et son système. Avec un nouveau soupir, je passai les portes, m’enfonçai dans l’atmosphère froide de Poudlard. Les couloirs étaient désertés, le couvre-feu allait bientôt tomber, et je ne mis donc que quelques très courtes secondes à rejoindre ma salle commune. Je ne m’y attardai pas, saluai quelques têtes connues au passage. Mon objectif était le dortoir. Faire disparaître toutes ces pensées qui se bousculaient. Retrouver un peu de calme intérieur. Faire taire le chaos des émotions que je ne parvenais plus à décrypter. Je m’allongeai rapidement, ne prit même pas la peine de retirer mes vêtements et, à bout de force, je cessai de lutter. Je m’endormis.

Pourtant, quelques trop courtes heures plus tard, j’étais à nouveau éveillé, les bras en croix sous ma tête, à vriller le plafond de mes iris scrutateurs. Je tentais vainement de retenir les pensées, les doutes de s’immiscer dans mon esprit, mais cela devint rapidement trop difficile. Alors, pour me distraire quelque peu, je décidai de quitter la salle commune. Je me redressai lentement, attrapai mes chaussures lâchées nonchalamment aux pieds de mon lit et me faufilai hors de la pièce. La salle était entièrement vide. Je jetai un coup d’œil à ma montre ; rien d’étonnant, vu l’heure avancée. Je m’immobilisai quelques secondes, le temps d’enfiler mes baskets, de réajuster quelque peu mon tee-shirt, et sortis. Comme dans la salle commune, il régnait, dans les couloirs, un silence qui me parut pourtant assourdissant. J’empruntai la direction des cuisines presque naturellement, comme si mon ventre m’avait dicté la voie à suivre, et j’y arrivai rapidement, découvrant bientôt que je n’étais pas le seul à subir les foudres de mon estomac, en pleine nuit. Ainsi que les insomnies, très probablement. Tandis que j’avançai tranquillement, les mains fourrées dans les poches de mon jean, mes yeux butèrent sur la jeune femme qui mordait dans un gâteau à la crème. Précisément l’objet de toutes mes pensées. Shaelyn Stern se trouvait là, se retournait précisément à l’instant où j’osai un nouveau pas vers elle. Ses yeux, j’en fus persuadé, reflétait parfaitement l’ahurissement qui se devinait sur mes traits. Depuis que cette Catsy Riley avait prédit notre mariage, ainsi que la mort de notre enfant, vingt-cinq ans plus tard, nous ne nous étions plus adressé la parole. Même nos petites entrevues secrètes avaient tout bonnement cessé. Je n’éprouvais, étrangement, pourtant aucune gêne à me trouver là, face à elle. Cette constatation aurait dû me faire peur, me faire fuir même. Pourquoi trouvais-je cela si… naturel ?

Je gardai l’immobilité, sentant ses prunelles me vriller comme si elle tentait d’obtenir des réponses à ses questions. Pourtant, je n’étais guère disposé à en trouver ; je me posais probablement les mêmes. Si ce n’était plus, aux vues des récentes prédictions qui m’avaient été faites – ma mort, pour être tout à fait précis. « C'est bien ma veine... Il fallait que je tombe sur toi ici, à une heure du matin... J'aurais bien aimé finir de manger avant que tu n'arrives. » Comme si nous reprenions le rituel qui avait été établi entre nous. Nous ne nous supportions, nous n’avions rien en commun et nous nous évertuions tous deux à le montrer à l’autre. Pourtant, un élément était parvenu à nous rapprocher, et pas des moindres. J’en étais parfaitement conscient, par ailleurs. Mais j’avais également parfaite conscience que cela n’était tout simplement pas suffisant à un mariage. J’en étais le parfait témoin. Le couple de mes parents, que j’avais toujours cru parfaitement stable, s’était révélé être une belle mascarade. Je ne voyais pas comment une relation – si on pouvait parler de relation – comme celle que je partageais avec Stern pouvait alors se muer en un mariage, avec enfant à la clé. Impossible. Quittant mes pensées, j’haussai les épaules à sa remarque. Que voulait-elle que je lui dise ? « Dispose, ou reste. Je n’en ai rien à faire. » Cela lui convenait-il ? J’arquai un sourcil, la regardai poser son gâteau et tourner les talons. Je m’apprêtai à m’avancer plus en avant dans la pièce, attraper un gâteau sec qui trainait dans un vaste plateau d’argent lorsqu’elle reprit la parole. « Finalement, fais ce que tu veux, je ne vais pas me priver pour toi. » Je ne pus m’empêcher de sourire ; non, on ne pouvait pas dire qu’elle se privait, en effet. Dans tous les domaines.

Pourtant, je gardai le silence, me contentai de scruter son visage avec une attention toute particulière. Ce ne fut que lorsqu’elle se hissa sur le comptoir que je remarquai sa tenue. Ses jambes interminables, ses cuisses trop peu dissimulées par la chemise dont elle était vêtue. Tout cela réveillait des souvenirs beaucoup trop intenses, mais je ne me forçais même pas à détourner le regard. Pour quoi faire ? J’imaginais déjà mes doigts sur sa peau nacré, et puis mes lèvres...

« Écoute... Tu ne crois pas à ces histoires de mariage, n'est-ce pas ? Toi et moi, on n'est pas compatibles, et c'est pas demain la veille que j'épouserai quelqu'un. » fit-elle, me tirant de mes pensées – fantasmes. Elle avait probablement dû s’apercevoir de mon regard trop langoureux. Pour toute réponse, j’haussai nonchalamment les épaules. Quelle était donc cette attitude si passive ? Je sortis de ma torpeur, passai une main dans la crinière ébouriffée par les quelques heures de sommeil que j’étais parvenu à m’octroyer.

« Quelqu’un, ou moi ? » osai-je avec des teintes narquoises dans la voix, tandis que je m’approchai d’elle, mes doigts glissant sciemment sur sa lèvre supérieure afin de balayer les restes de crème dont elle s’était recouverte en dévorant sa part de gâteau. Je la soupçonnais de se jouer de moi, de me provoquer. Je me reculai ensuite, désinvolte, me hissai à ses côtés en haussant les épaules à nouveau. « Hmm, tu sais, il y a seulement quelques jours, on prédisait ma mort... » commençai-je avec légèreté. « Tu te retrouveras probablement très vite veuve. » J’eus un sourire, m’étonnai du peu de sérieux que j’accordais à l’éventualité d’une telle fin. D’ailleurs, était-elle au courant de cette prédiction concernant ma perte ? Je n’en étais même pas certain. C’était chose faite à présent.

« Pour être franc, je ne sais pas si cette histoire mérite réellement qu’on s’y attarde. » C’était vrai. Montana avait prédit ma mort et, visiblement, cela n’arriverait pas. Pourquoi croirais-je donc à la version de cette Catsy ? « Je ne pensais d’ailleurs pas que cela puisse t’atteindre. »
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Message par Shaelyn Stern Ven 16 Avr - 12:49

Contrairement à mon interlocuteur, j'avais énormément de mal à garder mon naturel et à rester désinvolte. Je n'avais même pas besoin de mon don pour comprendre ce qu'il pensait, j'avais bien vu sa façon de me regarder, et je ne comprenais pas comment il pouvait agir ainsi sans gêne aucune. Il avait sans doute dépassé un stade sur lequel je butais encore. Celui d'assumer l'attirance que j'avais pour lui. Je ne voulais rien faire pour l'encourager, pourtant je lui envoyais constamment des signaux silencieux. Je me comportais vraiment comme une adolescente finalement, pleine d'orgueil et de mauvaise foi. Il était sans doute plus mature que moi, mais là encore, je ne pouvais me résoudre à lui donner raison.

    - Quelqu’un, ou moi ?

Tout le monde. Mon don ne me permettrait pas de vivre une relation sérieuse avec qui que ce soit, même avec Sky. Surtout avec Sky, en fait. Mais je ne répondis pas, le contact des doigts du Poufsouffle sur mes lèvres m'arrachant un frisson d'aise. Même ce simple geste me faisait de l'effet. Se rendait-il compte du pouvoir qu'il exerçait sur moi ? Je ne l'espérais pas. Je ne voulais surtout pas qu'il me pensât dépendante. Tandis qu'il s'asseyait près de moi, je tentais de me désintéresser de lui et attrapai une nouvelle part de gâteau, mais le regrettai immédiatement. Je n'avais pas spécialement envie de m'empiffrer devant lui. Je gardai donc mon assiette à la main sans y toucher, alors qu'il reprenait la parole.

    - Hmm, tu sais, il y a seulement quelques jours, on prédisait ma mort...

Je tournai la tête vers lui, incrédule. Sa mort ? Plaisantait-il ? Si c'était le cas, ça n'avait rien d'amusant.

    - Tu te retrouveras probablement très vite veuve.

Je choisis d'ignorer son cynisme. De toute évidence, il cherchait à provoquer une réaction chez moi, et je ne voulais pas lui donner ce plaisir. Je regardai ma part de gâteau d'un air dépité, puis la posai finalement à côté de moi. Je n'avais vraiment plus faim. Si la seconde phrase du jeune homme était clairement un sarcasme, je me demandais si cette histoire de prédiction était réelle. L'image de Montana m'apparut subitement, comme une évidence. Pourquoi n'y avais-je pas pensé ? Je savais qu'elle avait ce genre de don, et je connaissais également son attirance pour Cooper. Depuis quand datait cette prédiction ? Était-ce pour cela qu'elle s'intéressait de si près au Poufsouffle ? Qu'avait-elle vu exactement ? Beaucoup de questions se bousculaient dans ma tête, et j'avais envie d'aller immédiatement trouver la Serdaigle pour les lui poser de but-en-blanc. Une autre interrogation vint alors bousculer les précédentes. Si la mort de Cooper était annoncée, pourquoi la version de Catsy témoignait du contraire ? Certes, c'était pour moi une affabulatrice, j'avais la quasi-certitude qu'elle venait bien du futur, et si elle connaissait le jeune homme, ça signifiait qu'il était encore vivant 25 ans après. Les visions de Montana pouvaient-elle aller aussi loin ? Tradd avait parlé de veuvage, mais c'était certainement une plaisanterie de sa part.

    - Pour être franc, je ne sais pas si cette histoire mérite réellement qu’on s’y attarde. Je ne pensais d’ailleurs pas que cela puisse t’atteindre.

A nouveau, je reportai mon regard sur lui, et mon regard grave montrait bien que je n'avais aucune envie de plaisanter sur le sujet. Je réalisai alors que j'en faisais sans doute un peu trop, et me dérida quelque peu. J'eusse aimé pouvoir être aussi détaché que lui, mais l'intervention de cette Ridley m'avait tellement interpelée que je lui accordais trop d'importance, et ne parvenais pas à me défaire de tout ce qu'elle provoquait chez moi. Les insomnies, par exemple. Je me sentais prisonnière des effets de cette bombe. Je tentai un sourire railleur, mais il se transforma certainement en rictus crispé. Finalement, j'estimai qu'il valait peut-être mieux prendre les choses avec sérieux. J'étais certaine que derrière la nonchalance du jeune homme se cachait de l'anxiété. On ne pouvait pas apprendre qu'on allait mourir sans en être affecté, même si on s'efforçait de ne pas y croire. Je baissai les yeux et me pinça les lèvres avant d'entamer mon discours.

    - En réalité... Je suis partagée. Je ne crois pas vraiment à cette histoire de mariage, mais je suis persuadée qu'il y a un fond de vérité quelque part. Tu as dû entendre comme moi les rumeurs qui circulent dans le château. Cette Catsy n'était pas seule. Tu ne trouves pas bizarre que des adolescents en uniforme de Poudlard, que personne n'a jamais vu, apparaissent tout à coup à l'intérieur de l'école sans qu'on ne les ait vus entrer ? Et il n'y a pas que ça. Parmi les élucubrations de la fille, il y avait des détails réels, même si je ne peux pas te dire lesquels. C'est troublant qu'une inconnue puisse connaître des détails que même des proches ne connaissent pas.

Je pensais surtout à l'homosexualité de Kerr et à la relation entre Sky et Leslie. Quant à la fraternité entre Jaylen et Karolyn... Je me demandais si elle n'était vraiment que pure invention. J'estimais qu'elle en savait bien trop pour avoir tout inventé. Je relevai les yeux sur Cooper, une lueur déterminée dans le regard.

    - J'ai l'intime conviction que cette gamine vient effectivement du futur. Ça n'aurait rien d'extraordinaire. Je pense même que c'est la fille d'Anissa Ridley ou du moins quelqu'un de sa famille, vu son nom. D'ailleurs, elle a parlé de sa mère. Si elle est vraiment sa fille, elle a certainement hérité de son aptitude à inventer des histoires et à répandre des rumeurs. Mais dans les histoires d'Anissa, il y a toujours une base réelle. Et si cette Catsy nous connaît, si elle te connaît, c'est qu'en 2027 tu seras toujours là. Tana ne peut certainement pas voir le futur 25 ans après. En conclusion...

Je posai ma main sur la sienne, par réflexe. Comme si subitement, je m'étais rapprochée de lui, et j'avais eu envie de le protéger. En cet instant, j'en avais oublié notre inimitié et nos querelles. Je ne pouvais me mentir, la mort potentielle du jeune homme m'avait retournée, et il m'était tout de suite apparu plus humain, plus... normal. Même cette agaçante perfection était mortelle.

    - Tu ne vas pas mourir.

Cette phrase n'était pas une affirmation, mais plutôt un violent désir de ma part. Je ne pouvais accepter cette éventualité. Je refusais catégoriquement qu'il puisse mourir, maintenant ou dans 25 ans. Je n'aurais su dire pourquoi cette hypothèse m'affectait autant, mais le fait était. Je plongeai mon regard dans le sien, essayant de lire dans ses pensées, de savoir s'il me suivait ou non dans mon argumentaire, mais également s'il partageait mon sentiment. Mais c'était lui qui devait mourir, pas moi. Il était évident qu'en ce qui le concernait, il se moquait pas mal de mon devenir, et certainement encore plus de ma compassion. Je ne me rendais même pas compte que j'étais en train de le dévisager avec concupiscence, comme si j'avais été prête à m'abandonner à lui dans l'instant, à répondre au moindre de ses désirs. Je réalisai alors que non seulement j'avais laissé ma main sur la sienne, mais que j'avais refermé mes doigts autour et que j'étais en train de la serrer très fort. En tant normal, j'aurais immédiatement lâché mon emprise et retiré ma main, honteuse. Mais je n'en fis rien. Ce silence entre nous avait quelque chose de solennel, et j'avais l'impression que les battements de mon cœur résonnaient dans la grande pièce. Je ne lâchai pas le Poufsouffle du regard, et approchai mes lèvres des siennes, comme si ça avait été dans l'ordre naturel des choses. C'est à ce moment-là que je choisis de lâcher sa main, cherchant quelque chose d'autre à tâtons. Quand mes lèvres ne furent qu'à quelques millimètres des siennes, je les lui tartinai subitement de crème.

    - Ne rêve pas.

Je le gratifiai d'un sourire narquois et me léchai consciencieusement les doigts. J'avais réussi à atteindre la part de gâteau que j'avais précédemment laissée de côté. Je décroisai mes jambes et les étirai pour les détendre un peu, puis les recroisai.

    - J'ai dit que tu n'allais pas mourir, je n'ai jamais précisé que je croyais en notre futur mariage.

Il était vrai qu'au départ, j'avais réellement eu envie de l'embrasser, mais c'eût été trop simple. Et s'il m'avait repoussée, j'aurais été honteuse et furieuse. J'avais donc décidé au dernier moment de le titiller un peu, pour lui faire comprendre que tout ne pouvait pas lui tomber tout cuit dans la bouche. De toute façon, cette étrange relation que nous entretenions n'avait d'intérêt qu'avec le piment qu'apportait notre animosité. Mais l'échange silencieux que nous avions eu avait quelque peu attisé mon attirance pour lui.
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