le rituel empoisonné. ft Hester & Bonnie.

Hester ; Bonnie
& Nick








Les rives du lac étaient des lieux convoités par tout Poudlard. Qui ne s’est jamais retrouvé assis contre un arbre, les yeux perdus sur la vaste étendue d’eau, rêveur, penseur, douteur ? Ce lieu mythique du château en avait connu des choses. Des défis, des duels, des incidents. Les premières années redoutaient toujours qu’on les jette à l’eau, apeurés non pas à l’idée de devoir se battre avec les eaux glaciales, mais surtout à l’idée des monstres inconnus qui peuplaient le lieu. En effet de nombreuses légendes affublaient l’endroit, glorieuses, moins glorieuses, inquiétantes, niaises… Libre à chacun d’y croire où non. Mais enfin, comme lieu emblématique c’en était bien un, et Nick le savait.

Vous savez les petits plaisirs quotidiens que l’on a ? Comme celui du pain brûlant qui craque entre nos doigts au petit-déjeuner, de se réveiller avec le seul rayon de soleil qui nous réchauffe le visage, du vent qui nous fouette le visage lorsque l’on prend de la vitesse dans les airs, d’enfiler la vieille paire de pompe légendaire de votre existence… Enfin, vous visualisez, pas vrai ? Et bien, Nick chérissait particulièrement un rituel, celui de sentir la brise rafraîchir son visage, déplacer quelques mèches de cheveux, à l’approche du lac. L’air y était toujours plus frais et plus fort, et autant vous dire qu’en ce début d’année, ce simple changement climatique le revitalisait et le réveillait une bonne fois pour toutes. Aussi, chaque matin, où midi il prenait sur son temps libre pour aller se vouer à son petit plaisir journalier, en solitaire.
Le voilà donc, le jeune Berlioz, prêt à affronter sa journée. D’une démarche rapide, Nick traversait le parc. Il était onze heures du matin, et n’ayant pas cours de onze à midi, sa pause déjeuner n’en était que rallongée. Donc tandis que la plupart de ses caparades se dirigeaient d’un pas pressé en direction de la grande salle, parce que déjà affamés, Berlioz’ se vouait à sa petite habitude. A cette heure-ci le parc n’était peuplé que par les jeunes élèves qui rentraient de la cabane du garde chasse après leurs cours de soins aux créatures magiques, Nick était donc tranquille, personne ne viendrait le déranger. Il avait retiré son pull en laine pour ne rester qu’en chemise blanche, sa cravate était déjà dénouée et pendait lamentablement autour de son cou. Un peu de liberté. Le conformisme de Poudlard l’étouffait de plus en plus, en particulier depuis le début de l’année. Il se retrouvait désormais de plus en plus à vaquer dans les couloirs, juste parce qu’il lui était impossible de rester trop longtemps dans un même endroit. Parfois, la présence de quelqu’un à ses côtés le rassurait, lui permettant de se rattacher à une certaine réalité, et à ne pas s’enfoncer dans une dimension noire de folie, d’autres il se sentait en état de rester seul et l’idée de se traîner quelqu’un à ses côtés le déstabilisait plus qu’autre chose. Malheureusement dans l’esprit de Nick, les choses étaient très formelles, tout où rien. Le juste milieu ? Buarf, pas dans son vocabulaire actuel.

A l’approche du lac Nick était déjà dans un état d’esprit complètement différent. Il s’était à peu près coupé des autres, n’entendant déjà plus le ricanement des premières années, le chahut dans les rangs, les piques entre Serpentards et Gryffondors. L’odeur des pins frais, de l’herbe à peine coupée… De la terre mouillée. Un frisson lui parcourut le corps, et comme pour chasse de mauvaises pensées le Serpentard hocha la tête. Par réflexe, il ferma un instant les yeux et continua son chemin machinalement, à l’aveuglette, confiant de ce qu’il faisait, d’où il allait. Lorsque enfin il sentit cette brise lui fouetter si docilement le visage Nick ouvrit lentement les yeux. Ca peut vous paraître une réaction exagérée, mais il sourit, et dieu sait à quel point c’était beau de voir Nick sourire en ce moment. Les rives du lac étaient désertées, et cela soulagea d’autant plus Nick qu’il se sentit seul maître du lieu, à l’instant. Ses pas le guidèrent encore plus loin, là où l’herbe était bien verte et moins courte, où les plantes sauvages avaient encore leur place, simplement parce que le coin était moins fréquenté, qu’il était à l’opposé du chemin principal menant au lac. C’était son coin. A l’abri d’un arbre le jeune homme posa ses affaires, puis s’assit, s’appuyant contre l’arbre, la tête légèrement relevée, les yeux fermés. Tâtonnant il trouva son paquet de clopes et son briquer, et d’un geste sûr glissa la cigarette au coin de ses lèvres avant de l’allumer, machinalement. Dieu que c’était bon.

"three cats sittin' on a wall"

___________CHALLENGING EVERYDAY.


« Miss Gray, vous reviendrez demain matin en retenue, puisque vous vous pensez suffisamment supérieure pour vous affranchir du règlement et inonder les toilettes des filles ! »

Des mots qui résonnaient dans la tête de Hester Gray depuis deux jours, se répercutant sans cesse, en écho, presque comme une habitude. On commençait à peine l'année, et Hester Gray avait débuté ses frasques. Presque comme une habitude.
La veille, Hester Gray, quatrième année à Gryffondor, s'était échappée en douce de son dortoir pour tester un nouveau sortilège déniché entre les pages d'un livre chipé dans la réserve - illégalement, encore une fois. Elle s'était assise sur le sol des toilettes des filles, déserts à cette heure-ci, et avait ouvert grand son livre sur ses genoux. Quelques heures plus tôt, elle avait laissé un mot à l'attention de Dawn Bennett pour qu'elle la rejoigne. Son amie de Serdaigle allait sûrement arriver d'une minute à l'autre.

« Hester ? »
« Oh, Dawn, cool, t'as pu venir, viens, entre et assieds-toi ! »

La rouquine, en pyjama, hésita une seconde, silencieuse.

« Je... je préfère pas... »
« Oh, allez, vas-y, relax... »

Dawn hésita encore, puis s'assit. Elle demanda alors ce que Hester fabriquait avec un livre volé, à une heure pareille dans les toilettes des filles, en pyjama, assise sur la pierre froide. Hester lui jeta un regard de malice, intrépide. Ses yeux bleus aux longs cils pétillèrent à la lueur de la lune, ses longues boucles blondes lui tombant sur les épaules. Tester un nouveau sortilège ? Dawn se demandait certainement ce qui allait leur arriver. Lorsque Hester prononca la formule, un violent jet de lumière bleue fusa de sa baguette, ricocha dans la pièce partout, produisant un vacarme infernal, arrachant un cri à Dawn, qui se protégeait la tête avec ses mains, s'étant levée d'un bond. Hester avait poussé un "wow !" surpris, et était grimpée sur un lavabo illico.
Puis le concierge était entré, et pouf, retenue pour Hester, avertissement pour Dawn, que Hester couvrit en disant qu'elle était simplement passée parce qu'elle ne se sentait pas bien et qu'elle n'avait rien à voir là-dedans.

Et voilà qu'Hester était sur la route de sa retenue, vers la cabane du garde-chasse, envoyée par la concierge pour aller faire ses corvées. Elle en profitait pour flâner un peu, marchant lentement, faisant des pirouettes dans l'herbe. Elle s'approcha du lac, sifflotant.
Sa jupe plissée volait au vent, dévoilant ses longues jambes fines, aux mollets dissimulés par de longues chaussettes blanches au liseré rouge et or. Sa chemise était sortie de sa jupe et les deux boutons du haut étaient défaits, sa cravate relâchée, son pull gris sur ses épaules. Hester était jolie, très jolie. Mais Hester était aussi agacante, très agacante, principalement à cause de son caractère prêt à relever n'importe quel défi aussi dingue soit-il, et à répondre tout ce qu'elle pensait quand elle le voulait.
Elle effectua un entrechat, puis se retourna. Une odeur de fumée de cigarette rôdait dans l'air et lui chatouillait les narines, désagréable. Un grand type brun était occupé à fumer sa cigarette adossé à un arbre, à moitié endormi. Elle ne le connaissait que de nom ; un Serpentard plus vieux qu'elle, un certain Berlioz. Dawn lui en avait touché un mot une fois.
Hester s'approcha de ce mec, puis se planta en face de lui, lui cachant le soleil, les mains derrière le dos.

« Salut. T'es Nick Berlioz, c'est ça ? »

Elle ne broncha pas, ses yeux bleus fixant le type qui dormait à moitié une clope dans la bouche.

« Je ne vais pas te dire que fumer est interdit ici, ce qui est le cas. D'ailleurs, je me fiche du règlement. Mais ta fumée pollue mon air. »

Hester Gray, dans toute sa splendeur.

Hester Gray. Une future héroïne, à titre posthume. Pour son futur, Bonnie se sentait obligée de se rapprocher d'elle. Mais voilà, une Serpentard amie avec une Gryffondor comme elle, c'était étrange. Car Hester était assez particulière. Têtue et rentre-dedans, elle était insupportable aux yeux de beaucoup. S'ils savaient ce qu'elle deviendrait plus tard, ils ne réagiraient sans doute pas de cette manière. Mais c'était le cas pour beaucoup ici. Connor, qui était détesté de beaucoup de monde alors qu'il deviendrait un héros adulé. Tristen Beckett, gentil garçon, sage et réfléchi, qui serait accusé de viol plus tard. Chance Thomas, plus timide et réservé, qui est en réalité un lycan qui fera quelques victimes. Les exemples de ce genre étaient nombreux, et il était difficile pour les quatre arrivants du futur d'avoir un avis impartial en sachant ce qu'ils savaient. Ils étaient obligés de faire comme tout le monde, de trouver Chelsea McCormick innocente et de ne pas croire les histoires de Pearl Smythe. Il en était de même pour Hester. Alors, Bonnie avait décidé de faire d'une pierre deux coups. Se rapprocher d'elle tout en jouant, en se servant d'elle. Avec son goût du risque, elle pouvait lui être utile, elle le savait.

Ce matin-là, Bonnie n'avait pas grand-chose à faire. Ou plutôt, si, elle aurait dû réviser. Comme d'habitude. Mais comme d'habitude également, elle n'en avait absolument pas envie. Ce fut quand elle vit passer Hester qu'elle eut un déclic. Celle-ci se dirigeait vers la sortie de Poudlard. Curieuse, comme toujours, Bonnie décida de la suivre. Voilà de quoi l'occuper au moins quelques minutes, voire une heure, selon ce la blonde ferait. Le passe-temps préféré de la Serpentard était d'espionner les gens, et Hester Gray était un sujet particulièrement intéressant, car le moindre détail pouvait lui permettre de se rapprocher davantage d'elle et de la piéger. Si ça se trouve, elle avait un rendez-vous amoureux... Mais il ne fallait pas rêver. Peut-être allait-elle simplement en retenue et, dans ce cas, Bonnie ne pourrait pas la suivre jusque là. Tandis que la Gryffondor avançait, la brune suivait quelques mètres plus loin, se cachant de temps en temps derrière un arbre quand elle trouvait. Mais avec la distance qui les séparait, Hester ne devait pas se douter qu'elle était suivie, et d'ailleurs elle ne se retournait jamais. Parfait. Elle avançait en direction de la cabane du garde-chasse, et Bonnie fit la grimace. Les retenues avaient parfois lieu dans cet endroit? Pourquoi irait-elle sinon ? Elle s'apprêta à faire demi-tour quand elle vit qu'elle se dirigeait plutôt vers le lac. Alors, la Serpentard continua à suivre, toujours curieuse. Ce fut à ce moment-là qu'elle aperçut Nicholas Berlioz. Et qu'elle vit Hester se diriger vers lui.

- Salut. T'es Nick Berlioz, c'est ça ? Je ne vais pas te dire que fumer est interdit ici, ce qui est le cas. D'ailleurs, je me fiche du règlement. Mais ta fumée pollue mon air.

Au fond d'elle, Bonnie jubilait. Voilà qui promettait d'être intéressant. Nicholas Berlioz faisait partie de ses (trop) nombreuses missions. Elle l'aimait bien, et c'était la raison pour laquelle elle voulait le séparer de Jezebel Fitzgerald. Plus tard, ils devaient être recherchés par les autorités pour l'assassinat de plusieurs sorciers. Aucune preuve contre eux, mais beaucoup de détails les accablant, notamment concernant des livres qu'ils auront écrits. Pour éviter cela, Bonnie devait les empêcher d'être trop proches, pour éviter qu'ils se missent à écrire ensemble. La seule solution qu'elle avait trouvée pour ça était de les caser l'un et l'autre avec une personne différente, pour qu'ils soient occupés par autre chose. Hester n'était sans doute pas la personne idéale pour Nick cependant. Mais elle pourrait suffire à détourner son attention de Jez pour un temps. Puisque Hester aimait tant les défis, Bonnie allait lui en donner un. Elle choisit donc de faire son apparition.

- Bonjour vous deux. Hester, t'as pas entendu que je t'appelais ? Je te suivais pour te dire quelque chose d'important, je peux te parler deux minutes ?

Bien sûr, c'était faux, elle ne l'avait pas appelée. Mais elle ne pouvait pas lui dire qu'elle l'avait suivie tout le long sans chercher à se faire remarquer si elle voulait lui dire quelque chose. Elle adressa un sourire à Nicholas et attrapa gentiment Hester par le bras pour l'amener quelques mètres plus loin.

- Hester, tu aimes les défis n'est-ce pas ? J'en ai un nouveau à te proposer. Si tu réussis, nul doute que beaucoup de filles te jalouseront, même des Serpentard. Autant te dire que ça sera pas facile, mais je sais que tu en es capable. Tu te rends compte que tu viens d'engueuler l'un des garçons les plus charismatiques de Poudlard ? Ca prouve que tu n'as pas froid aux yeux. Alors, je te mets au défi d'arriver à le séduire. Je pourrai même t'aider, si c'est possible. Tu dois te demander ce que j'y gagne, hein ? En fait, je l'aime beaucoup, et je trouve qu'il a de mauvaises fréquentations. Je préférerais qu'il s'en détourne pour s'intéresser à une fille comme toi.

Elle mentait, en partie du moins. Mais elle connaissait Hester, elle savait que l'envie d'être reconnue serait plus forte que la méfiance qu'elle nourrissait envers Bonnie, si méfiance il y avait. Elle jeta un œil à Nick, sourit et reporta son regard sur Hester. La distraction pouvait commencer.